Semaine 2/25 – Suisse – De l’irrecevabilité des recours devant le Tribunal fédéral / Complicité de soustraction d’impôt

Dans le cadre du résumé de l’arrêt 9C_420/2023 du Tribunal fédéral du 13 novembre (voir notre blog de la semaine 51/24), nous exprimions notre étonnement du nombre croissant de rappels des règles de procédure que le Tribunal fédéral fait, y compris dans ledit arrêt, et surtout de la gravité, en premier lieu pour les intérêts des contribuables-recourants, des faiblesses rédactionnelles relevées, dès lors qu’elles entraînent l’irrecevabilité des conclusions ou des arguments. Faut-il voir davantage de procès en responsabilité pour faute professionnelle des mandataires pour prendre conscience de la nécessité de faire preuve d’un zèle accru ?

Ainsi, sur le plan de la procédure, l’arrêt 9C_251/2024 du Tribunal fédéral du 2 décembre révèle que

  • le recourant concluait, dans le cadre de son recours en matière de droit public, à l’annulation des amendes qui lui avaient été infligées par l’autorité de taxation, ignorant ce faisant l’effet dévolutif complet du recours auprès de l’instance précédente, avec pour conséquence, l’irrecevabilité,
  • il demandait uniquement l’annulation de l’arrêt attaqué et ce sont les juges qui ont dû déduire qu’en réalité, il concluait à ce que l’arrêt attaqué fût reformé en ce sens que la décision antérieure fût annulée,
  • il se plaignait d’une constatation incomplète des faits, sans tenir pourtant compte des exigences posées aux articles 97 alinéa 1 et 106 alinéa 2 LTF,
  • le complément de motivation fait dans la réplique a dû aussi être écarté.

Reprenant les griefs d’ordre formel du recourant, le tribunal a rappelé, en rapport avec le droit pour l’intéressé d’avoir accès à son dossier, en particulier que (i) la consultation du dossier peut être refusée, intégralement ou partiellement, en présence d’intérêt public ou d’intérêts privés prépondérants (voir notamment notre blog de la semaine 51/24), (ii) il peut y avoir des imprécisons admissibles dans les pièces communiquées, pour autant que le contribuable puisse néanmoins se déterminer en connaissance de cause et (iii) l’autorité peut utiliser en défaveur du contribuable une pièce confidentielle, mais à la condition seulement de lui en communiquer préalablement le contenu essentiel, pour qu’il puisse se déterminer.

Sur le fond, l’instance antérieure avait retenu la complicité de soustraction et de tentative de soustraction du recourant, ayant agi comme organe de fait de la société qui s’était rendue coupable de ces infractions en tant qu’auteur, ce qui permettait de retenir la complicité à son encontre pour avoir rendue opaque la situation économique de la société. En effet, sous l’angle de la complicité, il n’est pas nécessaire que le comportement repréhensible soit une condition sine qua non de la réalisation de l’infraction ; il suffit qu’il accroisse les chances de succès de l’acte principal, ce qui avait été le cas en espèce. Concernant l’élément subjectif de l’infraction, le tribunal a estimé qu’il n’y avait pas de raison de s’écarter de ce qui avait été retenu contre la société (arrêt 2C_733/2022 du 13 décembre 2022), à savoir que le recourant, en sa qualité d’organe de fait, avait eu intentionnellement recours à des mécanismes insolites visant à rendre opaque la situation économique réelle de la société, notamment ses charges commercialement justifiées. Son recours contre les amendes qui lui avaient été infligées a été rejeté.