Semaine 22/19 – Suisse – Les demandes de révision et de réexamen

Ce sont ces demandes qui sont au centre du litige jugé par le Tribunal administratif fédéral le 3 mai (A-956/2019) en matière d’impôt anticipé, donc selon les dispositions de la PA. En voici l’essentiel :

  • Une demande de reconsidération comprend à la fois la révision au sens de l’article 66 PA et le réexamen au sens de la jurisprudence, les deux tendant à la révision d’une décision et constituent des moyens de droit extraordinaires qui permettent de remettre en question une décision entrée en force, de telle sorte que l’affaire fasse l’objet d’un nouveau prononcé.
  • L’article 66 PA énumère de manière exhaustive les motifs de révision. Les trois premiers – la partie allègue des faits nouveaux importants ou produit de nouveaux moyens de preuve, elle prouve que l’autorité de recours n’a pas tenu compte de faits importants établis par pièces ou n’a pas statué sur certaines conclusions, elle prouve que l’autorité de recours a violé certaines dispositions bien précises – n’ouvrent la voie de la révision que s’ils ne pouvaient pas être invoqués dans la procédure précédant ce recours ou par la voie du recours contre cette décision ; il s’agit de faits qui s’étaient déjà produits au moment du jugement initial, mais dont la connaissance est intervenue plus tard, par opposition aux faits qui sont survenus subséquemment.
  • Les conditions matérielles du réexamen et de la révision sont pour l’essentiel identiques, celles-là comprenant en outre le cas où les circonstances, de fait ou de droit, se sont modifiées dans une mesure notable depuis le prononcé de la première décision. De même que la révision n’est pas recevable si les faits allégués auraient pu l’être dans le procédure initiale, de même la demande de réexamen ne doit pas servir à guérir des manquements aux obligations incombant aux parties ou à faire valoir des faits que la partie en cause aurait pu alléguer auparavant, dans le cadre de la première procédure.
  • S’agissant de la révision de décisions de première instance, elle n’est plus possible une fois que l’autorité de recours s’est prononcée matériellement sur le fond, seule étant alors ouverte la voie de la révision de l’arrêt qui a mis fin à la cause.
  • Pour ce qui est du réexamen pour faits ou droit nouveaux, cette procédure demeure possible alors même que l’autorité de recours s’est prononcée matériellement sur l’affaire, dans certaines circonstances. Ainsi, dans certains cas relatifs à des rapports juridiques durables, la force de chose jugée ne s’oppose pas nécessairement à une modification due à un changement de circonstances de fait ou de droit. Il n’est en revanche pas possible de requérir un réexamen pour faits ou droit nouveaux lorsqu’une instance de recours s’est prononcée matériellement sur l’affaire, si l’état de fait qui fait l’objet du jugement est circonscrit dans le temps et pleinement révolu, le sort juridique en étant alors définitivement tranché par l’autorité de recours.
  • En vertu de l’article 125 LTF, la révision d’un arrêt du Tribunal fédéral confirmant la décision de l’instance antérieure ne peut être requise pour un motif qui a été découvert avant le prononcé de l’arrêt et qui aurait pu être invoqué dans une procédure de révision devant l’autorité précédente. Le Tribunal fédéral a eu l’occasion de préciser que bien que la plupart des droits cantonaux connaissent la règle selon laquelle une demande de révision ne peut porter que sur une décision entrée en force, une instance inférieure ne peut pas refuser d’entrer en matière au sujet d’une demande de révision pour la simple raison que le litige fait l’objet d’un recours au Tribunal fédéral.
    L’application par analogie de l’article 125 LTF devant le Tribunal administratif fédéral contredirait à la maxime inquisitoire que ce dernier connaît, à la différence du Tribunal fédéral. Ainsi le Tribunal administratif fédéral doit tenir compte des faits nouveaux portés à sa connaissance, de sorte qu’il devrait en tout état de cause connaître d’un éventuel motif de révision découvert avant le prononcé de son arrêt.
  • Seul le dispositif du jugement est revêtu de l’autorité de chose jugée, sauf si le dispositif se réfère expressément aux considérants, auquel cas ceux-ci acquièrent eux-mêmes la force matérielle. Ainsi, lorsque le Tribunal fédéral rend un jugement dont le dispositif prévoit que la décision attaquée est annulée et l’affaire envoyée à l’autorité intimée pour qu’elle statue à nouveau dans le sens des considérants, cette dernière est liée par la motivation juridique de l’arrêt de renvoi. C’est donc la motivation de l’arrêt de renvoi qui détermine dans quelle mesure la cour inférieure est liée à la décision de renvoi, qui fixe aussi bien le cadre d’un état de fait que celui de la nouvelle motivation juridique. Les faits nouveaux ne peuvent être pris en considération que sur les points ayant fait l’objet du renvoi, lesquels ne peuvent être ni étendus ni fondés sur une base juridique nouvelle. Dans ces conditions, si les parties contestent la nouvelle décision rendue sur renvoi, elles ne peuvent pas soulever des moyens que le Tribunal fédéral a expressément rejetés dans l’arrêt de renvoi ou qu’il n’a pas eu à examiner, les parties ayant omis de les invoquer dans la première procédure de recours, alors qu’elles en avaient la possibilité.

Dans le cas d’espèce, le tribunal a jugé que la demande de révision et de réexamen pour une des périodes aurait dû être considérée comme irrecevable par l’instance antérieure, tout comme la demande de révision concernant les périodes subséquentes, alors que la demande de réexamen avait été à juste titre rejetée par l’autorité inférieure.