Les quatre arrêts que le Tribunal fédéral a publiés la semaine dernière – 2C_549/2018 du 30 janvier, 2C_373/2018 du 31 janvier, 2C_627/2017 du 1er février et 2C_539/2017 du 7 février – traitent tous de l’interdiction de la double imposition intercantonale en présence d’un conflit de compétences entre le canton du siège d’une personne morale et celui de son administration effective.
En voici les principaux enseignements tirés d’une jurisprudence constante (depuis 1919) et de ces arrêts en particulier:
1. Au regard du droit de la procédure :
- Le Tribunal fédéral n’examine pas d’office la question de l’interdiction de la double imposition, mais uniquement lorsque ce grief est invoqué et motivé par le recourant.
- Dès lors que, dans un litige relatif à l’interdiction de la double imposition, les instances cantonales ne doivent être épuisées que dans un canton, le canton n’ayant pas participé à cette procédure doit pouvoir se prévaloir devant le Tribunal fédéral de faits et d’arguments qui n’ont pas été examinés auparavant. Il s’agit d’un cas exceptionnel où le Tribunal fédéral peut statuer sur les faits, en dehors de l’arbitraire.
- Une décision peut être attaquée pour ce motif, avant même qu’une autre soit rendue par un autre canton (double imposition virtuelle).
- En cas de pluralité de décisions, il n’est pas nécessaire que le contribuable les conteste individuellement toutes et il lui suffit d’attaquer celle qu’il entend en fin de compte porter devant le Tribunal fédéral.
- Le délai de recours commence à courir au plus tard où chaque canton a pris une décision sujette à recours devant le Tribunal fédéral.
- Le fardeau de la preuve de l’assujettissement en raison de l’administration effective, selon des preuves ou indices objectifs, incombe bien évidemment au canton qui s’en prévaut.
2. Au regard du droit matériel :
- Pour que l’assujettissement au siège de l’administration effective soit fondé, il faut que celle-ci ait été complètement évacuée du canton de siège, lequel n’abrite dorénavant plus que le siège statutaire, devenu ainsi purement formel.
- Le déplacement de l’administration effective hors du canton du siège n’exclut toutefois pas, selon les circonstances, la conservation, dans ce canton d’un for fiscal secondaire, sous la forme d’un établissement stable, auquel cas la question de la double imposition ne se posera pas en termes de compétence exclusive mais de compétences concurrentes.
- Le lieu de l’administration effective d’une personne morale correspond, par comparaison à une personne physique, à son centre des intérêts vitaux.
- C’est dans ce lieu que se concentrent, les actes caractéristiques de la conduite des affaires courantes de la société, dans le cadre de son but statutaire, par opposition aux actes de direction, prérogative des organes de la société.