Semaine 47/23 – Suisse – TVA : Exploitation d’aéronef et refus de la déduction de l’impôt préalable au motif d’évasion fiscale

Selon l’état de fait dans la cause A-534/2022, la recourante, propriétaire d’un avion, avait confié la gestion et l’exploitation exclusive à des tiers de son avion à une société spécialisée, constituée par elle. Elle percevait un loyer correspondant à un pourcentage des recettes, calculé cependant différemment selon que les clients étaient des tiers ou des personnes proches d’elle.

Dans son arrêt du 6 novembre, le Tribunal administratif fédéral rappelle la jurisprudence du Tribunal fédéral posant les paramètres quantitatifs selon lesquels le caractère insolite, élément objectif de l’évasion fiscale, doit être reconnu. Il se réfère aussi à la Web-Info TVA 11 concernant le secteur du trafic aérien.

En l’espèce, les avantages accordés indirectement par le contrat de gestion aux utilisateurs de l’avion proches de la recourante ne correspondant pas à la pratique commerciale et l’absence de risque chez la société d’exploitation en particulier, faisaient que le but entrepreneurial de la recourante était relégué au second plan au gré des opportunités de commercialisation de l’avion et seulement lorsque les ayants droit économiques n’en faisaient pas usage. Le caractère insolite, limité toutefois aux vols pour les besoins privés des ayants droit économiques, a ainsi été retenu. Les deux autres conditions de l’évasion fiscale ayant été jugées également présentes, le tribunal a rejeté le recours visant à faire admettre la déduction de l’impôt préalable facturé sur cette catégorie de vols. Il a relevé au passage que l’application de la jurisprudence la plus récente (arrêt du Tribunal fédéral 2C_217/2022 du 15 décembre 2022) n’aurait pas abouti à un résultat différent ; selon cette jurisprudence, l’utilisation privée de l’avion dépassant largement les 20% de l’utilisation totale, les vols en question ne feraient pas partie de l’activité commerciale de la recourante et, n’entrant pas dans le champ d’application de la TVA, ne donneraient pas droit à la déduction de l’impôt préalable.

Enfin, le tribunal a rejeté l’argument de la recourante selon lequel l’article 26 OTVA ferait obstacle à l’application de la théorie de l’évasion fiscale : la fourniture de prestations à des personnes étroitement liées est certes considérée comme un rapport de prestations, mais cela n’implique pas pour autant que l’activité ne puisse pas ne pas être commerciale lorsque les prestations servent à satisfaire les besoins des ayants droit économiques ou de personnes qui leur sont proches.