La péremption du droit du contribuable de se prévaloir de l’interdiction de double imposition intercantonale intervient lorsque celui-ci a, de manière explicite ou implicite et sans réserve, accepté l’entrée en force de la taxation d’un canton, alors qu’il fait face à la prétention concurrente d’un autre canton (voir notamment notre blog de la semaine 35/22). En dehors de cette hypothèse, la péremption ne doit être admise qu’avec une grande retenue, notamment lorsque le comportement du contribuable est empreint de mauvaise foi, par exemple en raison des fausses informations qu’il a sciemment communiquées (voir notamment notre blog de la semaine 45/19). En tout état de cause, la péremption n’est pas constatée d’office, mais doit être soulevée par les autorités cantonales impliquées.
Dans son arrêt 9C_710/2022 du 17 août, le Tribunal fédéral rappelle sa jurisprudence ainsi résumée. Toutefois, il examine en détail la position critique de la doctrine au sujet de la péremption en tant que sanction d’un comportement contraire à la bonne foi et, considérant que les conditions pour un changement de pratique telles que définies dans l’arrêt 8C_661/2022 du 26 juin 2023 sont réunies, conclut à un revirement de jurisprudence dans le sens où la péremption n’est dorénavant plus un moyen approprié de sanctionner le comportement contraire à la bonne foi du contribuable en matière d’interdiction de la double imposition intercantonale.
L’interdiction de la double imposition intercantonale vise à protéger d’une part les droits du contribuable et d’autre part les intérêts du canton compétent. Pour autant, le tribunal admet que le canton qui n’a pas compétence de prélever l’impôt – tant au regard de l’interdiction constitutionnelle qu’au regard de la LHID – peut néanmoins conserver l’impôt prélevé sans compétence territoriale lorsque, exceptionnellement, il y a un intérêt légitime et lorsque le comportement du contribuable imposé à double relève de l’abus qualifié. Aucune de ces deux conditions n’est cependant explicitée.